15 Avril 2021
Ecrit en 2010 et là encore....Qu'est-ce qui a changé ?
Il n’est pas certain que l’engouement pour ce sceau sacrificiel « hallal » soit totalement étranger à ce que subissent à travers le monde, les populations de cultures musulmanes.
Les problématiques sont évidemment différentes selon que l’on soit d’origine maghrébine ou africaine en France, là ou la mémoire se crispe, ou que l’on soit turc en Allemagne ou bien encore Tunisien en Italie.
Une chose est certaine, depuis un certain nombre d’années et notamment depuis le fameux 11 Septembre 2001, l’Islam est devenu non seulement l’otage de toute les ignorances mais plus grave encore, le refuge de toute les déceptions et frustrations identitaires. S’Il ne s’agit aucunement de désigner ici un coupable ou un responsable de cette situation, Il s’agit en revanche de tenter de comprendre comment sortir de cette polémique qui au bout du compte ne fera que des victimes.
Tout d’abord, puisque la question est souvent posée, qu’est ce donc au juste cette appellation Hallal ?
Il semble que « Hallal » soit un mot Arabe qui signifie littéralement, ce qui est permis. Cette « permission » d’ailleurs se réfère aux préceptes à partir desquels est jugée bonne par la révélation coranique et ses savants, tout ce qui alimente la vie d’un adepte de cette voie et pas seulement ce qui passe par son tube digestif.
Il n’en faut pas plus aujourd’hui pour que certains arabes se croient propriétaires de cette révélation au point d’en faire un signe particulier sur une nouvelle carte d’identité « hallalisée » et que des non-musulmans soient d’une égale stupidité au point de penser que Hallal est le mot siamois d’Arabe.
D’autre part, il n’est peut-être pas superflu de rappeler encore et encore que le terme « musulman », s’il désigne celles et ceux qui adhèrent au message révélé par Dieu au prophète de l’islam, recouvre également l’ensemble de celles et ceux qui acceptent l’idée qu’ils n’ont pas leur raison suffisante et se conforment à une voie religieuse ou doctrinale orthodoxe quelle qu’elle soit, pour tenter d’accéder aux états supérieurs de leur conscience.
Ce qui fait dire à certains sages qu’un bon juif est forcément bon musulman, qu’un bon musulman est forcément bon chrétien, un bon chrétien forcément bon juif et que tous ces mots qui les spécifient ne sont que l’appellation particulière d’une foi commune exprimée en modes multiples.
Il nous reste le mot Haram que l’on entend également souvent et qui, lui, exprime autant l’interdit que le sacré.
Du reste, on ne peut pas dire qu’il soit l’opposé de Hallal puisque ce qui est haram peut être ou pas hallal selon certaines conditions. La preuve, la « masjid el haram » ou mosquée sacrée de la Mecque est à la fois « permise, hallal » (à toutes celles et ceux, sans discrimination d’aucune sorte, qui souhaitent communier sur les lieux saint de l’islam en respectant les lois qu’impose ce pèlerinage) et interdite (à toutes celles et ceux qui s’y rendraient avec la seule intention de profaner). Cette règle élémentaire du bien vivre ensemble s’étend à toute forme de société réglée par des devoirs et des droits quelle qu’en soit la nature, d’ordre spirituel ou temporel.
Il est intéressant de noter que cette vague de piété hallal se soit insinuée en particulier dans le seul secteur alimentaire où s’engouffrent tous les faiseurs de fric - par ailleurs absolument indifférents à toute forme de foi et disposés à épouser n’importe quel Dieu pourvu qu’il puisse leur permettre d’accéder au paradis du CAC 40…
Il est à craindre que si l’ensemble des gouvernements qui se crispent sur cette illusion au lieu de la dissiper ne font pas le travail nécessaire pour réhabiliter rapidement ceux qu’ils excluent depuis tant d’années, le fléau s’étendra à l’ensemble des activités de nos sociétés. Rien ne dit alors que les labels divins ne se mettent à fleurir sur le terreau fertile de l’obscurantisme de nos sociétés civilisées.
Nous aurons ainsi des candidats hallal aux élections, des artistes kacher, des piscines chrétiennes et des services de moins en moins publics.
Toutes ces « normes identitaires » stigmatiseront un monde fractionné par l’incompétence et l’inconscience de gouvernements successifs incapables de traiter les problèmes de fond de nos sociétés. Le plus inquiétant dans la contagion de ces revanches, ou affrontement des mémoires par Dieux interposés, reste la propagation de ces sectarismes qui risquent de voir s’exacerber les haines et refleurir les intégrismes de tous bords.
Alors, Messieurs qui vous croyez grands et qui poussez les peuples dans les bras de Dieux revanchards, mettez-vous au travail avant que le glas ne sonne, et levez le voile de votre indifférence sur une souffrance insupportable que votre lâcheté a posée en bâillons sur des générations de citoyens désespérés.